En mémoire de Sigmund

Dans son message en mémoire de Sigmund, Moni utilise un "nous" faisant implicitement référence à une autre personne. Je pense être la seule personne à pouvoir dire également : Sigmund était notre chien.

En mémoire de notre fidèle compagnon, je voudrais juste rappeler les cinq raisons pour lesquelles nous avons appelé notre chien Sigmund.

1)   2001 était l'année du "S" pour les animaux de race. S comme Sigmund.

2)   Freud et notre chien ont eu l'un et l'autre un problème à la mâchoire : l'un est mort d'un cancer de la mâchoire à force de mâchonner et de fumer des cigares, tandis que l'autre avait un défaut d'alignement de la mâchoire inférieure (prognathisme) quand il était chiot.

3)   Le métier de Freud passe avant tout par l'écoute attentive de ce que disent les patients : il faut avoir de grandes oreilles pour bien écouter… Notre chien, qui avait de grandes oreilles, a appris à écouter plein de choses dans le discours des humains. Il comprenait surtout les émotions, du moins certaines d'entre elles. Je me souviendrai toujours de ces moments de très grande tristesse où notre chien est venu, à trois reprises, me réconforter en frottant sa tête contre mes jambes.

4)   Moni et moi étions tombés d'accord sur le fait que Sigmund l'aiderait dans son travail. De fait, l'expérience a confirmé que la présence d'un animal dans le cabinet d'un médecin psychiatre ne posait aucun problème d'hygiène, mais aussi et surtout qu'elle réconfortait tous les patients venus parler de problèmes souvent douloureux, lourds, délicats et difficiles à exprimer, mais aussi à entendre et à traiter. En 14 années de collaboration, seul un patient a catégoriquement refusé la présence de notre chien dans le cabinet pendant les consultations... Cela signifie que tous les autres patients, même ceux qui avaient peur des animaux, ont rapidement accepté la présence de cet assistant médical à quatre pattes et l'ont même réclamée lorsqu'il faisait sa sieste dans une autre partie de la maison. Quant aux gardiens du temple de la psychanalyse freudienne qui voudraient nous maudire, je n'en ai cure : le célèbre Freud avait lui aussi deux chiens à la maison, de race chow-chow, et je ne serais pas surpris d'apprendre un jour que l'un de ces deux chiens s'est faufilé dans le cabinet pendant une consultation pour venir dormir aux pieds de son maître…

5)   Parce qu'il m'a obligé, chaque jour de notre vie en commun, à m'occuper de quelqu'un d'autre que moi notamment pour le nourrir, pour jouer un peu avec lui, pour l'éduquer et pour le promener, notre chien m'a apporté une aide précieuse pour sortir d'une maladie contre laquelle j'ai dû lutter pendant dix ans. Dès lors, je peux témoigner que la présence d'un animal de compagnie aux côtés d'une personne malade, quel que soit son âge, peut constituer un puissant facteur psychologique aidant la guérison. Cela, même les personnels soignants de services hospitaliers spécialisés dans les maladies purement organiques et aussi déshumanisés que ceux de cancérologie le reconnaissent aujourd'hui, c'est vous dire…

Moni, Sigmund et moi formions une meute. Nous l'avons emmené quasiment partout avec nous, préférant modifier notre emploi du temps ou renoncer à un voyage plutôt que de laisser notre fidèle compagnon trop longtemps seul ou entre les mains d'une personne en qui nous n'avions pas confiance.

Alors, oui, aujourd'hui, je partage entièrement la tristesse de mon épouse lorsqu'elle pleure notre chien basset aujourd'hui disparu. Adieu, Sigmund, merci pour tout ce que tu nous as apporté. Nous ne t'oublierons jamais.

Fredus