En mémoire de Pock

Bénévole depuis quelques mois, avec beaucoup de temps libre, je venais quasiment tous les jours au refuge balader les chiens, aider au nettoyage des box, des chatteries, etc. Je m'étais plus particulièrement donné comme mission de canaliser l'énergie d'Athéna, une croisée Rottweiler et Am'staff qui était au refuge depuis longtemps et ne trouvait pas d'adoptant car, impossible à gérer en balade. Intéressée par l'éducation positive et le clicker, j’appliquais quotidiennement cette méthode à Athena dont les progrès furent alors fulgurants : elle devint rapidement « promenable » et obéissante. J'avais dans l'idée de l'adopter mais le temps que j’y réfléchisse plus sérieusement, la belle quitta le refuge, ayant charmé un couple. Mais pour moi, l’idée avait fait son chemin… Peu de temps après, une dame se présente à la SPA, souhaitant adopter un senior. On lui présente Pock, 16 ans dont presque 12 de refuge, qui semble la séduire. Mais lorsqu’on lui apprend que ce chien ne se laisse ni caresser, ni toiletter, ni manipuler par qui que ce soit, évidemment, l’intérêt tombe d’un seul coup. Comment ne pas avoir le cœur fendu en voyant ce loulou rater une si belle occasion de passer l’hiver au chaud ! On dit souvent, "un mal pour un bien" ... Et c’est exactement ce qui s’est passé ce jour-là. C’était un peu avant Noël, le froid et la pluie sévissaient et bien-sûr, au refuge, pour les vieux chiens comme Pock, les conditions de vie étaient particulièrement difficiles. Chacune des salariées ayant pris un chien chez elle, il restait Pock… Que j’ai aussitôt proposé de prendre chez moi, en attendant des jours meilleurs. Etant donné son passé, ce pauvre chien n'avait absolument plus aucune confiance en l'humain. L’embarquer dans la voiture n’a pas été une mince affaire ! Mais ça l’a fait et il est resté quelques jours à la maison, m’ignorant royalement sauf à l’heure des repas et des balades. Puis, la météo étant plus clémente, il a réintégré le refuge où je le voyais tous les jours. Très vite, j'ai constaté qu'il aimait rester à mes côtés et qu'il me regardait avec insistance derrière la grille lorsque je repartais en fin de journée. J'ai fini par le prendre en famille-relais, pensant que, peut-être, au sein d'un foyer calme, en lui laissant du temps, il pourrait reprendre confiance en l'être humain et être adoptable. J'ai appliqué quelques règles d'éducation positive que j'avais testé avec Athéna, récompensé ses bons comportements, et au bout de 3 semaines, il m'a laissé le caresser : d'abord la tête, puis le dos. Au bout de 2 mois, j'ai pu le brosser gentiment et 4 mois plus tard, il prenait son premier bain. Son regard n'était plus le même, il ne fuyait plus, bien au contraire. Il m'avait accordé sa confiance, pleine et entière. Alors, je l'ai définitivement adopté, ou peut-être serait-il plus juste de dire, qu’il a finalement choisi de m’adopter ? De toute façon, je n'aurais pas eu le cœur de le trahir et de le ramener au refuge. Je l'ai gardé 2 ans : 2 merveilleuses années où chaque jour il progressait un peu plus. Ce chien était une boule d'amour étouffé sous la crainte et la défiance. Quel gâchis ! Que de temps perdu pour lui à qui personne n’avait voulu donner sa chance ! Il a rejoint le paradis des chiens en janvier dernier. En écrivant ces quelques lignes, je ne peux retenir mes larmes car il me manque terriblement. Il était mon alter-ego, je l'aimais plus que tout et il me le rendait tellement bien.

Laurence